Attaques de sirènes sombres

Bonjour à tous,

Lucide depuis un petit moment déjà, l’objectif était clair. Je marchais tranquillement et passais de porte dimensionnelle en porte dimensionnelle, en route vers un Clan de Crapauds.
Agrippée étroitement dans l’une de mes mains, une sirène dont la forme avait été forcée au reconditionnement pour être « facilement transportable ». A vrai dire, je la tenais comme une simple pochette à main. Il faut dire, elle n’était pas vraiment enthousiaste à l’idée de me suivre après avoir été prise en flagrant délit en train d’attaquer des humains, et je n’étais pas vraiment enchantée d’avoir un problème en plus à traiter…

Elle gigotait comme un petit chihuahua voulant s’échapper à la première opportunité !

– T’arrête de gigoter, oui ?! rétorquai-je en la secouant tout en resserrant davantage ma poigne. Toi et ton Clan attaquez les humains, et t’as pas eu de bol, t’es tombée sur moi en pleine attaque, dis-donc ! Eh bah voilà ! Maintenant, toi et ton Clan, vous êtes dans le collimateur. On va s’occuper de votre cas et toi tu serviras de lien, donc tu me suis, c’est comme ça.

Elle couina sèchement et se recroquevilla davantage sur elle-même.

– Ma pauvre lucette… prise la main de la sac ! C’est con hein ! C’est moche la vie. Baaaah ouiiiii, je sais ! Soit tu te plies, soit j’utilise la force, dans tous les cas, c’est la même. Tu peux plus m’échapper, autant l’accepter ! Eh oui, pour vous, l’aventure s’arrête là ! Bon… et il est où ce clan de crapauds, là ? Non, parce que m’occuper de votre cas, j’ai pas envie. On va leur demander de gérer ça.

Au détour de quelques carrefours passés, une entrée de pub irlandais se dessina. A l’intérieur, c’était une véritable cacophonie partagée entre la foule rassemblée autour de grosses beuveries, les instruments de musiques, les claquements de verres entre eux, les rigolades et accolades en tout genre, le temps en chantant et s’exclamant.
On retrouvait dans ce clan l’ambiance d’époque de pubs irlandais. C’est à cet instant que je réalisais l’impact qu’avait ce type de Clan sur la culture anglo-saxonne.

3 pas à l’intérieur, je contournai quelques grosses tablées qui ne relevaient même pas la tête, et puis l’appel fut émis.

– J’appelle le Chef du clan. Je viens pour m’entretenir avec le Clan. Où est-il ?

Au son de ma voix, tous les visages se tournèrent dans ma direction, stupéfaits. Un silence de mort prit place. Plus aucun son, plus aucun mouvement. Toute la salle avait comme arrêté de respirer.

– Alors ? Je demande à m’entretenir avec le chef de votre Clan, pouvez-vous me conduire à lui ?

– « Ici », dit une voix depuis une table derrière moi.

Je me retournai et ne vis personne se manifester de manière explicite.

– Ici, où ? Lequel d’entre vous dirige ce clan ? (un silence se fit.) Eh bien ? Lequel d’entre vous m’a dit « ici » ? Ici, c’est qui ? Est-ce que vous pouvez vous manifester parce que je ne le détecte pas.

L’un des hommes à table tendit son bras en se levant. Il pointa son compère avachi sur la table, ivre mort.

– « C’est lui. »

– Ah, je vois, dis-je en souriant. Bon, là je crois qu’il n’est pas disponible ! (je vis une table libre dans le pub, tirai une des chaises et m’y avachis lamentablement.) Et, est-ce que l’un d’entre vous peut traiter cette rencontre à sa place ? Je viens vous voir pour vous demander de l’aide. J’ai ramené avec moi cette sirène sombre. Elle et son clan attaquent les humains. J’aimerai que vous m’aidiez à traiter ce sujet et que vous vous en occupiez pour moi.

Personne n’osa bouger le petit doigt. Aucun d’eux ne savait comme réagir face à ma présence en ces lieux, surtout avec un chef indisponible.

– Alors ? Quand le chef n’est pas là, qui reprend les demandes ? … Je ne viens pas pour vous causer du tort ou pour vous faire du mal. Je viens parce que j’ai besoin de l’aide de votre clan. Personne ?… Personne n’est capable de m’accueillir pour traiter ce sujet avec moi ?

L’homme qui avait répondu précédemment s’extirpa de son placement, contourna les tables et les dos des uns et des autres et se fraya un chemin jusqu’à moi.

– « Moi. Je prends le relais. Je vais m’en occuper de cette rencontre. »

– Bien. Merci.

Il me vit tirer une autre chaise et déposer sur l’assise molletonnée, le fameux paquet que je portais. L’homme s’approcha et se malaxa nerveusement les mains ne sachant pas comment agir.

– « Souhaitez-vous boire quelque chose ? » demanda-t-il courtoisement.

– Ah oui, c’est gentil de demander ! Je veux bien un thé, si possible. Si ça ne vous dérange pas.

A peine eus-je le dos tourné que la sirène releva la tête, me vit lui tourner le dos et tel un petit chihuahua vif, bondit de la chaise prête à prendre la fuite à vive allure. Elle n’eut pas le temps de toucher le sol que ma main se releva et d’un geste sec, je tirai une laisse imaginaire en lui imposant une soumission absolue. Toute la salle se raidit en m’entendant grogner sèchement.

– TOI, ASSIS. (La force d’attraction fut telle que le choc la sonna en la replaçant sur son siège.) Je t’ai dit que tu n’irais nulle part. Tu restes à ta place. T’as toujours pas compris, c’est fou, ça !

Tous avaient perçu le poids de la soumission forcée. Le silence dans la salle était plombant. Je roulais les yeux au ciel.

– Moi, j’en ai marre !, feulai-je exaspérée par la situation. Vous savez, il y a toujours des problèmes, c’est TOUS-LES-JOURS, encore et encore, ET ENCORE. Avec cette planète, ça n’arrête jamais ! Tous les jours !! Moi j’en peux plus ! J’ai trop de problèmes à gérer, vous savez ! Là, je viens demander de l’aide. Y faut m’aider, je ne m’en sors plus ! Je ne peux pas gérer autant de sombre toute seule ! Avec cette planète, vous traitez un problème sombre, vous en avez 10 autres qui apparaissent ! C’est infernal !! C’est sans fin !

L’homme déposa délicatement une tasse sur la table qu’on lui amena, ainsi qu’une belle théière en céramique. La décoration était florale, et vintage, avec une certaine délicatesse qui s’en dégageait. Il plongea une grande plaque d’argent massif dans la tasse de thé, dont seul 1/10ème de la plaque trempait dans le liquide chaud.
Normalement, avant de servir à boire, il fallait traiter les énergies du service à thé, puis énergétiser le liquide. Le service n’avait visiblement pas souvent servi car la plaque d’argent massif qui servait à purifier ma tasse de thé était elle-même encrassée. Il y avait des incrustations de tartre et de saletés en paquet ici et là, avec des tâches d’oxydation bien prononcés.
Une plaque d’argent massif devait être un gris brillant, étincellement, clair et pur. Là, elle était parsemée de couleurs ocre, cuivre et noir, avec des petits ilots de saletés accumulées.
Je ne sais pas ce qui m’amusait le plus dans l’histoire : de voir la plaque en équilibre ne pas faire renverser la tasse remplie, ou de voir que le service n’avait tellement jamais servi qu’il devait tout nettoyer pour moi. Ils semblaient tous être pris de court.



– Hm, vous n’avez pas l’habitude de recevoir on dirait ! La plaque n’a pas l’air propre.

– « C’est que… nous n’avons pas beaucoup de visiteurs… »

L’air contrit, il prit un gros morceau de coquillage vide ressemblant étroitement à une moitié de coquille Saint Jacques et se mit à racler la plaque d’argent pour gagner du temps dans le décrassage. Des vieux morceaux de tartre et de saletés s’éjectèrent en masse. Il frottait fort pour accélérer le process et m’offrir une meilleure qualité d’accueil.

– Pas beaucoup de visites… hm, les anges ne viennent pas vous voir de temps à autre ?

– « Non, aucun ange n’est jamais venu. Nous n’étions pas préparé à cette rencontre. »

– Jamais ? Même pas depuis la création de votre Clan ?

– « Non. Jamais. »

– Ah… je vois… Ce n’est rien, ne vous en faites pas. Je suis venue à l’improviste. J’ai l’intention de mettre à profit les compétences des clans de la nature afin qu’on travaille tous ensemble pour cette terre. Je vais donc davantage solliciter les uns et les autres pour déléguer certains problèmes. Cela va non seulement soulager ma charge de travail, mais également créer une unité dans la collaboration terrestre en plus de faire briller vos compétences respectives. Voilà ! Alors aujourd’hui, je fais simplement le livreur, et je vous ai apporté un petit paquet ! Je vous livre cette sirène sombre et je vous délègue ce problème. Vous êtes des gardiens. Trouvez une solution pour faire cesser définitivement ces attaques envers les humains. On ne veut plus voir des humains mourrir noyés à cause d’attaques de sirènes, ce n’est pas acceptable. Traitez avec elle, là, celle que je vous ai ramenée, retrouvez son Clan, et débrouillez-vous pour faire arrêter leurs agissements. J’ai vraiment des plus gros problèmes à traiter que d’avoir des sujets de sirènes à gérer. Occupez-vous en. Si vraiment en cours, vous faites face à des complications, appelez-moi, mais sinon débrouillez-vous. Trouvez une solution pour traiter définitivement ce problème. En tant que Gardiens, vous devriez être capables de quadriller, de surveiller, d’alerter, mais aussi de contenir. Protégez les humains dans le périmètre du Clan, déjouez les attaques et contenez leurs ardeurs. On ne leur demande pas d’arrêter de vivre, mais de ne pas attaquer les humains. Qu’elles apprennent à vivre autrement. Les autres clans y arrivent, je ne vois pas pourquoi elles, elles n’y arriveraient pas.

– Et toi, clôturai-je en pointant du doigt la sirène recroquevillée sur son siège, Toi, tu serviras de lien en tant que représentante de ton clan, tu as compris ? Tu vas mener gentiment le Clan de crapauds à ton Clan. Si tu t’enfuis au cours des déplacements et que tu leur causes problèmes, je n’aimerai pas avoir à venir te chercher par la peau du cul. Tu vas me faire perdre mon temps, je serai de mauvais poil, et tu passeras un très sale quart d’heure. Je te conseille d’assumer les conséquences de tes actes et les répercussions des débordements que toi et ton clan avaient causés. Pour vous, c’est terminé. Plus tôt vous l’acceptez, mieux vous vous en sortirez.


Le gentil crapaud incarné en un jeune homme continuait de s’investir dans la préparation du service de thé. Il tendait l’oreille, comme tous ceux présents.

– Voilà, j’espère que votre Clan acceptera de m’aider ! Bon, vu que votre chef peut pas trop répondre… J’imagine sa tête quand l’un de vous lui raconterez ce qu’il a raté parce qu’il avait trop bu ! hahaha ! On vient jamais, jusqu’au jour où quand on vient, on rate l’évènement ! Ah, c’est moche la vie ! haha le pauvre…


Je ris tellement fort et spontanément que les vibrations me ramenèrent tout droit dans mon lit avant même d’entendre leur réponse…. A la seconde même où je rouvris un oeil, je ris à nouveau comme un phoque.

– Ah c’est moche la vie ! Hahaha, mais la tête qu’il va faire celui-là ! Le pauuuuuuvre hahaha…. Il va être dégggggg en plus de devoir travailler ! hahaha




Alors pour ceux qui se demanderaient comment a agi ce Clan de sirènes sombres pour attaquer les humains, eh bien, en réalité, c’est plutôt simple. Elles attrapaient les gens, et les tiraient vers le fond. Ils mourraient noyés. Leur beauté ne ressemble pas à la petite sirène, mais plutôt à des créatures fines et élancés, aux membres allongés, dont la peau est caoutchouteuse de par le contexte environnemental dans lequel elle évolue. Elles ont une ou plusieurs queues longues qui leur permettent d’aller à vive allure.
Elles peuvent établir leur territoire dans les lacs, les marécages, les mers et océans. Selon l’objectif du Clan, le lien à la Terre, et le liens avec les humains, elles peuvent interagir avec nous même sans qu’on en ait vraiment conscience.

Si on parle spécifiquement des attaques sombres de ce Clan en particulier, ils attendaient que les proies (humains) s’éloignent un peu, là où ils n’ont plus pieds, puis, elles arrivent des fonds, tendent le bras, vous attrapent et vous tirent vers le fond. Il est difficile de s’en sortir car leurs griffes acérées font qu’elles se plantent dans les membres et ne lâchent pas facilement. Cela donne une impression de se sentir happé, d’être tiré, ou d’être aussi paralysés par un poids qui nous empêche de sortir du pétrin.
Leur objectif est de se nourrir des énergies sombres dégagées au moment de votre mort, telles que la peur, le désarroi, l’angoisse, les phobies, la terreur, l’impuissance, les remords….

Alors tous les clans de sirènes sombres ne sont pas ainsi. Il est question ici de celui relatif à cet article.
D’ailleurs, ce clan m’a beaucoup fait penser à cet épisode de Netflix, « Love, Death and Robots » – épisode JIBARO, qui est une superbe représentation de clans sombres.


Peut-être qu’un jour, il serait bon d’écrire une page plus détaillée sur les sirènes en général. A voir. Qui sait.

Bonne journée



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