Gabriel et les codes de communication

Un Ange se tint devant une jeune fille qui ne se préoccupa pas de sa présence. Elle passa devant lui tout en l’ignorant et continua ses besognes. Elle enchaînait les rangements et passait de la chambre à la cuisine la tête furtive, concentrée uniquement par ses affaires.
La maison était celle de mes grands-parents, et le jeune fille, c’était moi sous mon apparence humaine. Mon esprit n’était pas dans ce corps-ci, mais dans un autre qui regardait la scène. Rapidement, je me matérialisais dans la pièce avec un autre de mes corps. Je reconnus aussitôt l’ange, c’était Gabriel.

Mon corps finit de prendre forme et je commençais déjà à râler intérieurement. Je n’avais pas oublié la dernière fois que lui et moi nous nous étions retrouvés en face à face. Cela avait tourné au vinaigre, et avec les mois qui passèrent, j’étais devenue plus qu’amère. Depuis, j’avais décidé de changer de ligne de guidance complète et avait déjà lancé le processus. En attendant la prise des mesures drastiques, j’avais entrepris « mon grand nettoyage de Printemps » et éjectais tous les guides qui étaient à ma portée. Concernant Gabriel, c’était plus compliqué. Il était mon ange gardien principal, alors pour l’éjecter… disons qu’on ne l’éjectait pas comme ça… Il était plus que coriace. Difficile de l’ignorer quand il prenait la peine de se manifester… Allait-il me faire une tirade de reproches ? Je l’interpellai alors froidement.

– Hmf Gabriel c’est toi, que fais-tu ici ?

Il m’entendit et se retourna aussitôt. Il se hâta de venir à ma rencontre. Cela en disait long sur la raison de ma présence ici. Il avait attendu ma venue, et donc, venait de me convoquer à ses côtés. Je me présentais à sa demande. Pour autant, savait-il que j’étais lucide et que je lui en voulais encore pour nos derniers échanges ? Visiblement non. Je m’attendais à une rafle de réprimande et des leçons habituelles à la con, mais au lieu de ça, je vis un Gabriel avec ses ailes bien ouvertes, stressé et nerveux. De la part d’un ange, ce n’était pas commun, encore moins quand il s’agissait de Gabriel.

« hm… Elle, … Elle ne m’entend pas », dit-il en regardant furtivement la petite fille puis en me fixant à nouveau. « Elle ne me voit pas…Je suis là pourtant, j’ai toujours été là, mais regarde… »

La jeune fille repassa devant lui et se décala à peine pour éviter de le toucher. Il se tenait dans le couloir qui séparait les deux pièces espérant qu’elle finirait bien par lui parler, mais ce ne fut pas le cas. Il tenta de la rattraper, la suivait au talon, mais elle ne se retourna point. Elle ne lui offrit aucune attention et fit tout pour l’éviter. Evidemment qu’elle t’ignore, elle veut changer de guides, elle ne veut plus avoir affaire à toi et tu le réalises seulement maintenant, pensais-je. Cela fait des mois qu’il y a un problème et tu ne le vois que maintenant… Il s’arrêta dépassé par la situation puis revint vers moi l’air toujours ennuyé. Il ne pouvait pas s’empêcher de jeter des regards inquiets sur la petite fille. Cela se voyait qu’il était tracassé et n’aimait pas la situation. Il voulait qu’elle le voit. Il voulait qu’elle lui parle. Mon cœur s’adoucit un peu. Je voyais bien qu’il tenait à elle, à moi en somme.

 » Tu vois, tu vois, je suis là, je ne l’ai jamais quittée, j’ai toujours été à ses côtés, toujours. Je ne suis jamais parti, j’étais là, regarde, ici, toujours avec elle depuis le début… depuis le tout début mais… »

Une vision de la création d’un recoin entier de l’espace apparut dans ma tête.

– Gabriel, l’interpellai-je en lui coupant la parole, Utilise ses codes humains si tu veux l’atteindre.
– « Comment ça, ses codes humains ? »
– Tu veux lui parler mais tu utilises tes codes angéliques. Tu l’approches avec ton langage, mais comment veux-tu qu’elle comprenne ? Elle vit sa vie d’humaine et toi tu arrives avec tes grands sabots qui dépassent totalement sa conscience. Evidemment qu’elle ne te comprend pas. C’est trop pour un humain. Si tu veux lui rappeler que tu es là depuis le début, ne va pas lui montrer ce que tu me montres actuellement. Je sais aussi que tu aimes être très précis quand tu t’adresses à quelqu’un, mais ne va pas lui dire non plus le nombre d’années exact qui va avec, surtout quand on voit le chiffre avec tous les zéros derrière… La vie d’Humain, ce sont des petits chiffres. Elle a 34 ans, comment crois-tu qu’elle va réagir si tu parles en centaines de milliers et X millions ?… Tu vas lui faire peur. Laisse tomber tes codes angéliques et adapte-toi à ses codes humains. Je vous l’ai dit et répété maintes fois, arrêtez d’utiliser vos codes angéliques quand vous voulez parler aux humains, cela ne fonctionne pas. Faites un effort et adaptez-vous.

Il la regarda à nouveau passer devant lui, se mordit les lèvres et ne savait pas quoi faire de ses mains. Il paraissait vraiment ennuyé. Il m’avait fait venir parce qu’il savait qu’un autre bout de ma conscience pouvait l’aider à améliorer la situation et à comprendre comment agir avec moi. Il avait eu raison. Tout comme de cette manière, il pouvait me montrer des choses qu’il ne pouvait pas à la petite fille.
Dans le fond, il ne voulait pas que je ressente cette souffrance au point de le rejeter lui. La relation avec les anges gardiens était précieuse et la voir se dégrader ne faisait pas partie de ses intentions. Pour la première fois de sa part, je ressentais un peu d’amour et de considération, pour la première en plus de 25 ans de rêves lucides. C’était la première fois. Et encore, il se manifestait parce que je prenais des décisions extrêmes. Ils faisaient toujours ça, me pousser à bout et après, ils venaient se plaindre des conséquences… Lui, comme Marie, comme tous les autres. Ils m’en faisaient baver, et après ils s’étonnaient quand je partais en couille.

– Gabriel, dis-je tout en soupirant, Rappelle-lui simplement que tu es là depuis sa naissance par exemple. Cantonne-toi à cette vie-là. Explique-lui que tu la suis depuis qu’elle est petite et que tu ne la quittes jamais. Si tu lui parles avec ses codes à elle, elle écoutera.

Plus tard, lorsque j’ouvris à nouveau les yeux dans ma chambre, je ne pus m’empêcher de soupirer longuement. Gabriel avait trouvé le moyen de m’attendre, et donc, continuerait d’utiliser ses codes habituels. Il n’avait aucune raison de s’adapter aux codes humains.

Avait-il fait exprès de me convoquer lucide ?… Je ne le saurais jamais. Pour autant, je trouvais que cela l’arrangeait bien. Son message était passé, mais je ne pouvais m’empêcher d’être amère. S’il croyait que cela allait résoudre notre problème de fond, il se trompait royalement.



4 Comments

  1. Emilie

    Bonjour Camille,
    Je n’aime pas ne pas savoir où on veut en venir et ne pas pouvoir contrôler le pourquoi du comment, comme beaucoup de monde.
    Cela m’est arrivé plusieurs fois de me réveiller avec le souvenir que je ne voulais plus faire ce travail où retourner travailler là où j’allais travailler… ce qui est sûr c’est que je n’ai jamais douté de l’amour de ceux qui m’accompagnent et ma gratitude pour leur patience est grande. Quand je dois décoder et que je mets des mois ou plus, à capter le sens symbolique d’un mot, d’un nom ou d’un nombre, je me sens stupide et lente !
    un jour où j’étais perplexe face à mes champs de bataille, le manque de clarté de certains messages et leur décalage avec ma vie concrète, j’ai juste capté une chanson qui en disait long sur nos problèmes de communication. Quand la tête bloque, le coeur peut entendre autrement (la chanson est un peu ringarde mais j’ai eu pire !)
    https://youtu.be/PTsSk0r_Tq8

    1. Spiritual Flower

      Bonsoir Emilie,

      J’ai oublié de te répondre, merci pour ton message. Moi aussi j’aime beaucoup capter des musiques ou des chansons particulières qui collent à ce que j’ai besoin d’entendre à un moment.

      Cela me fait toujours drôle, et je souris toujours.

      Bises

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